Toodè N° 42
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15 février 2004
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Parler, piailler, discuter, cancaner, bavarder,
échanger, vociférer, argumenter, causer, jaser, papoter, déblatérer, babiller,
converser, dialoguer, jacasser, discourir, proclamer, marmonner, dénoncer,
crier, …faire silence.
Dans notre quotidien quelle place,
quelle valeur donnons nous à la parole ?
Aujourd’hui nous avons envie de
vous partager notre réflexion (préparée pour un rassemblement de jeunes en mai
2003).
La parole dans le couple, comment elle se dit, comment elle s'écoute, comment elle s'entend à partir des trois axes de la vie du couple chrétien : liberté, fidélité, fécondité.
Il y a
treize ans une parole s'est échangée, deux être se sont donnés. Cette parole, à
la fois un aboutissement et un commencement. Aboutissement d'un amour né entre
deux personnes qui a eu besoin d'éclater au grand jour, de se dire, de
s'exprimer, de prendre forme à travers un sacrement. Car Dieu n’y est pas
étranger, Il est la parole faite chair en Jésus Christ qui nous est donnée de
vivre par l’esprit. Commencement d'une vie nouvelle en couple puis en famille.
Il y a
treize ans, cette parole a été une parole donnée et une parole reçue.
Aujourd'hui, cette parole continue à être donnée et reçue dans le quotidien de
notre vie.
Cette
parole, elle est libre. Elle se donne et se reçoit en vérité dans le
quotidien de nos vies. Chaque soir, la parole rend compte de la journée passée,
elle donne place à chacun des membres de la famille, car chacun à quelque chose
d'important à dire. Cette parole je l'écoute et je l'entends car elle me parle
et m'apprend un peu de chacun. Elle me questionne et me travaille. Parfois elle
est tellement libre qu'il faut l'encadrer pour permettre à chacun de s'exprimer
et à tous de l'entendre. Bien sur, certain soir, la parole des enfants nous
monte à la tête, nous y devenons étrangers et l’heure tourne. Alors on s’énerve
un peu ! La parole ne prend pas de
valeur avec les années, il y a juste les mots qui sont parfois plus ajustés et
mieux posés ! Cette parole a aussi une dimension libératrice. Car chaque mot
que je pose me fait exister. Je pense donc je suis disait quelqu’un, nous
pourrions dire, je parle donc j’existe. Et je grandis, car cette parole n’est
pas anodine. Elle vient de l’intérieur, par elle je me livre. Je pose des
actes, car la parole est un acte en soi. Acte qui peut être fondateur. Il l'a
été pour nous par la mariage. Fondateur et libérateur, car dorénavant la vie
s’ouvre pour nous deux. Libéré aussi par le Christ, par cette parole d’amour
qu’il nous donne.
Cette
parole, elle est fidèle. Elle est le repère sur le chemin, la lumière dans
mes nuits, la poignée à laquelle je me raccroche. Depuis treize ans elle nous tient, même un
peu plus, car nous ne nous sommes pas rencontrés la veille de notre
mariage ! Cette parole elle nous tient, mais tenir ne veut pas dire
retenir. Cette parole n’est pas un carcan, elle n’est pas la chaîne qui me
retient prisonnier et m’empêche d’aller côtoyer autrui. Elle est un lien, un
peu comme la corde qui rend les alpinistes solidaires dans l’ascension et leur
permet de se sécuriser. Cette fidélité dans la parole donnée, elle rime avec
confiance (et c’est une rime riche). Confiance de tous les instants. Bien sur
qu’il y a des doutes, des questionnements, des interrogations. Et bien la
parole est la d’abord pour en rendre compte, pour les accueillir en leur
donnant une forme, en y mettant des mots. Ensuite la parole permet le
dialogue. Et là je rejoins ma foi en
Dieu. Ma foi vibre de la confiance que Dieu met en moi. Il vient transcender en
moi la parole que je porte. Il lui donne dimension d’éternité. Etre fidèle c’est être en vérité. Jésus nous
dit « je suis le chemin, la vérité et la vie ». Jésus, c’est d’abord
une fidélité sans concession donnée par Dieu depuis le début des temps. Une
fidélité sans cesse renouvelée, nous pouvons citer ensemble tous ces passages
de l’ancien testament où Dieu renouvelle son alliance. Tous ces passages où il
revient sans ce lasser auprès des hommes : Noé, Abraham, Moïse. Soyons en vérité dans nos paroles et nous
serons chemin de vie. Pour soi, pour son conjoint, pour ses enfants et pour
tous les autres.
Cette
parole, elle est féconde. Elle est le ciment avec lequel
nous bâtissons notre famille qui en treize années à vue naître trois garçons,
Nathanaël, Samuel et Timothée. Elle est le terreau dans lequel nous faisons
grandir notre confiance en Dieu. Elle est l'élan qui nous pousse et nous invite
à faire communauté avec ceux du quartier, de la paroisse…Cette parole n’est pas
égoïste, elle ne me renferme pas sur moi-même, bien au contraire elle m’ouvre à
l’autre. Elle nous a porté pendant deux années au Burkina Faso. Puis à notre
retour, une fois installé à Décines elle nous a
permis de créer des liens, de rentrer dans une communauté et d’y prendre place.
La parole de Dieu est féconde car elle nous porte à la partager. D’abord avec
les plus petits en prenant part à l’animation de l’éveil à la foi. Puis avec
les parents qui ont le désirent de ne pas rester sur le bord du chemin sur
lequel leurs enfants font leur premiers pas de chrétien. C’est alors la mise en
place d’un groupe de petite catéchèse pour les grands. Qui est d’abord un lieu
de parole partagée avant de devenir un lieu de partage de la parole.
La parole
ne se dit pas seulement avec des mots , elle passe aussi par des regards, des
sourires, des gestes… Dans l’Ancien Testament on nous dit : « Dieu
n’est pas dans le tonnerre de l’orage, ni dans le fracas du vent dans les
arbres, encore moins dans le tumulte des eaux bouillonnantes du torrent, mais
dans le souffle fragile d’une brise légère. Dans le Nouveau Testament, un
passage nous dit : « Jésus posa sur lui son regard et l’aima »
De même on n'écoute pas seulement avec ces oreilles, il faut savoir entendre
avec son corps.
« Il faut que nos paroles soient
enflammées, mais par l’affection intérieur ;
il
faut qu’elles sortent du cœur plus que de la bouche. On a beau dire, mais le
cœur parle au cœur, et la langue ne parle qu’aux oreilles. » SF