Toodè N° 3
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15 novembre 2000
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A propos du 10° anniversaire de
la Convention des droits de l'enfant ..
L'humanitaire a une partie de ses racines dans les valeurs proposées
depuis deux ou trois millénaires par les grandes religions du Livre qui forment
la base de ce que l'on appelle la culture judéo-chrétienne. Autour de ces
valeurs millénaires, les religions traditionnelles ont forgé et imposé au cours
des siècles des codes de moralité qui ont fini par produire ce que l'on appelle
les droits de l'homme ou le droit humanitaire. L'action humanitaire
s'affranchit quant à elle de la référence juridique et explore des voies
d'accès à la souffrance et à la détresse humaine qui soient plus pragmatiques
et plus directes. Inculturée dans la société de
consommation de masse, elle a parfois tendance à se confondre avec un business
(on parle de Charity Business). Mais elle est aussi
un héritage des codes de moralité issus de la culture judéo-chrétienne, au même
titre que les
Conventions de Genève ou de la Déclaration Universelle des droits de
l'homme.
La question qui se pose, et que nous n'allons pas résoudre ici, est celle
de l'universalité de ces valeurs. Le développement de l'action humanitaire
s'apparente bien à un mouvement d'universalisation d'un esprit d'humanité, qui
n'appartient pas qu'aux seuls occidentaux ou aux seuls
"judéo-chrétiens". Lorsqu'il travaillait à la rédaction de la
Déclaration Universelle des droits de l'homme, René Cassin insistait pour faire
valoir le terme de fraternité dans le texte final de cette Déclaration. On
retrouve cette influence en lisant le texte du préambule de cette Déclaration,
qui proclame que "la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les
membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables
constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le
monde".
Parler en terme de fraternité signifie que les valeurs humanitaires sont
présentes dans toutes les cultures, même sous des formes différentes, et qu'il
n'y a pas lieu de hiérarchiser une culture par rapport à une autre.
De la même manière que la souffrance est une expérience universelle,
aucune culture ne peut prétendre détenir le monopole de l'humanisme. Toutes
cherchent seulement à résoudre le problème de la vie et de la
mort, et proposent aux hommes des voies pour y parvenir. C'est ainsi que
le proverbe bariba, qui dit que "tout homme
passe par le même trou lorsqu'il naît et lorsqu'il meurt" explicite très
bien cette égalité des cultures devant la contingence humaine : qui peut mieux
qu'un autre dire d'où vient l'homme, et surtout, qui peut définitivement
résoudre de son vivant la question de la mort ? L'humanitaire est bien un
chemin universel qui peut conduire vers le divin en s'intéressant d'abord à
l'homme, même s'il peut tout à fait être accompli sans y reconnaître la trace
de Dieu. C'est ce qui fait sa force de rassemblement.
Chronique
n° 3 Toodè-Théotime 15 NOVEMBRE 2000
Philippe
RICHARD