Toodè N° 33
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15 mai  2003

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… droit et non droit se côtoient …

 

Ma première réflexion voudrait revenir sur le livre de l’Exode au chapitre 20, qui fut la lecture  du 3ème dimanche de carême. Et plus spécialement Exode 20, 7 « Tu n’invoqueras pas le Nom du Seigneur ton Dieu pour le mal. » Cette maxime fait partie d’une série de 10 plus connues sous le nom des dix commandements. En cette année 2003, elle a résonné fortement du fait des évènements mondiaux. Elle s’est trouvée amplifiée par les discours de certains soit disant « grand » de ce monde. Voici que Dieu devenait justification d’actions militaires, de faire valoir d’actions guerrières. Le monde se retrouvait divisé en deux catégories, les « bons » d’un coté et les « méchants » de l’autre, ceux qui sont du coté du « glaive de justice » et  ceux qui sont du coté obscur de la force. Mais Bush n’est pas Lucas et le JT de 20 h n’est pas le dernier film d’animation. Quoique certaines chaînes de télévision aient stationné au niveau du « réality show ».  Après le temps des discours et le temps du chaos. Nous voici maintenant dans le temps de la rançon. Le vainqueur se paye largement, à une époque on disait royalement. Sous couvert d’administration d’un pays détruit on fait main basse sur l’or noire. Nous voici revenu 5 siècles en arrière, à l’époque des conquistadors, où les puissants d’alors se sont enrichis d’or jaune et blanc en détruisant des ensembles culturels et sociétales. Le « bien être » économique de quelques états passe par la mise sous tutelle et l’appauvrissement de populations entières. Sociétés américaines dans le cas de l’Irak mais aussi française, avec TotalFinaElf, dans le cas du projet de construction d’un oléoduc de 1750 Km reliant la mer Caspienne (Baku) à la côte méditerranéenne de la Turquie (Ceyhan). Projet pour lequel des contrats prévoient que les compagnies pétrolières ne seront pas soumises à un certain nombre de lois sociales et environnementales. Les Etats se retrouveront dans l’impossibilité de mettre en cause la responsabilité des entreprises en cas de dommages (pollution, accident). Les gouvernements seront tenus de dédommager le consortium s’ils créent de nouvelles taxes ou des réglementations en matière de sécurité et de santé.  

 

En opposition complète avec cet état d’esprit, ma seconde réflexion porte sur la dernière cession de la commission des droits de l’homme de l’ONU durant laquelle l’église catholique est intervenue pour rappeler son attachement et la nécessité du dialogue inter-religieux pour le service de la paix. « … un tel dialogue représente une contribution importante à la paix, aux relations harmonieuses et à la solidarité entre les personnes et les peuples ». Le dialogue inter-religieux, c’est d’abord le temps de la rencontre, de la découverte de l’autre, de cet autre différent. Mais c’est aussi la rencontre et la découverte de soi-même. Car au contact de ce qui m’est différent je vais me construire, me développer. Je vais donc rentrer un peu plus dans ce qui fait mon être spirituel, à la fois dans son histoire, sa culture, ses croyances… Cet être, il va questionner, douter, chercher. Puis il va trouver des réponses en soi même, mais aussi en l’autre. L’échange va s’instaurer, chacun va alors exister par ce qu’il est, par ce qu’il dit, ce qu’il éprouve mais aussi par l’autre, par le retour qu’il lui fait. Ce dialogue inter-religieux, François de Sales la expérimenté avec les frères protestants. Lui, haut dignitaire de l’église du Chablais va aller à la rencontre, un peu à l’inconnu de l’échange. Il va devoir se découvrir, se mettre en avant. Il va devenir incitateur de dialogue et c’est ce que l’Eglise d’aujourd’hui nous rappelle : «  La responsabilité première de la promotion de ce dialogue revient aux chefs religieux eux-mêmes… la qualité du dialogue inter-religieux dans notre culture contemporaine dépendra de la capacité des chefs religieux à considérer leur propre diversité comme une partie d'une authentique culture de pluralisme ». Mais, ce dialogue ne peut se vivre que si l’Etat offre dans sa législation le droit à la liberté religieuse et s’il permet à chaque communauté religieuse de se doter des structures lui permettant d’exister pleinement. C’est l’expérience que nous sommes entrain de vivre en France avec la mise en place du CFCM (Conseil français du culte musulman.) « Chaque communauté religieuse a droit à sa propre existence et à la reconnaissance légale qui lui permet d'agir pleinement dans n'importe quel pays. » Bien sûr que cela a été un peu provoqué, un peu poussé si ce n’est même encadré. Mais une partie du chemin est amorcée ; charge maintenant à la communauté musulmane de le poursuivre et de le consolider.

Et comme nous le dit François,

 

« il faut avoir un cœur de longue haleine. Les grands desseins ne se font qu’à force de patience et de longueur de temps. Les choses qui croissent en un jour, se perdent en un autre. Courage donc, mes amis. »