Toodè N° 14
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15 octobre 2001

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A Recife, j'ai entendu le cliquetis des grilles des luxueuses villas qui se protègent, j'ai entendu le pas trop sec des hommes en armes crispés à l'entrée des banques, et juste à côté, j'ai eu du mal à deviner, des favelas, le cri qu'on étouffe: exaspération !

Confortablement assis dans la voiture, j'ai "goûté" les fruits qu'un enfant à demi nu volait à l'étalage: rage!

J'ai vu ce jeune visiteur occasionnel d'une prison africaine sans mur -car il n'y a même plus l'espoir de s'évader-  se laisser gagner par la nausée : indignation!

 

Afghanistan, Taliban, Pakistan, djihad, terrorisme de masse, bio-terrorisme, Dieu, paradis, enfer… un mélange d'images se tient sous nos yeux avec une ténacité insistante, indiscrète, indécente…

Les mots, l'escalade des mots qui se brouillent et embrouillent, la guerre des communiqués gomment toute vérité et  censurent la parole.

Quels secrets ces images et ces mots dissimulent-ils ? Qui en profitent-ils ?

Ces mots et ces images cachent des possessions et des régressions: sur la terre d'Israël et de Palestine il a fallut des millénaires pour gagner la loi du Talion, qui laissait envisager un chemin plus juste, "œil pour œil, dent pour dent", et se profiler une loi de perfection et d'Amour … Il ne faut jamais que quelques instants d'escalade et quelques instincts de vengeance et de démesure, pour en flirter avec le fanatisme et le chaos.

 

Voir, entendre, sentir, toucher, goûter… nos 5 sens éveillent-ils à la vie ou à la mort?

 

François de Sales, qui connu aussi un siècle de violence nous le redit avec insistance : " … les yeux, les oreilles et la bouche sont les portes de l'âme"" (François de Sales TAD VI) Autant d'ouverture en notre être, plus fructueuse que les blessures, par lesquelles l'homme devient communication et communion.

 

Mais que devient l'homme lorsqu' il est condamné à tout voir sans jamais savoir?

Que devient-il lorsqu'il est obligé à tout entendre sans rien comprendre ?

 

Les images exacerbent sa sensibilité mais  les mots viennent à manquer pour dépasser l'émotion.

S'ouvre alors  le temps du silence… du questionnement :au bout du compte, qu'est-ce qui me donne du souffle, me fait respirer et vivre ?

Il ne s'agit pas de fermer les yeux sur des images de mauvais goût ou de dégoût,

pour les ouvrir sur des images de fraîcheur et de bonheur : ce n'est point la magie des images mais la naissance de la parole qui nous apprends à retourner les événements en les voyant à l'endroit bien plus positifs que tous les revers et tous envers.

Soyons attentifs à la parole. Lorsque notre "cœur  craint la souffrance".

Ecoutons ce que la brise du large ou le vent des cimes souffle aux hommes et aux femmes quand ils parlent entre eux de la mort et de la vie qui ne font qu'un.

 

De la parole naîtra mon choix: le "non-plus-jamais-ça" le triple oui de ce que je décide, exige et décline comme bonheur. Ici, perce la parole, authentique acte moral qui engage et transforme le monde…

Tehem.