Toodè N° 8
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15 avril 2001

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Parakou, le 31 mars 2001

T8 Toodè 15/04/2001

Parlons élections, c'est à la mode.

Ce n'est peut-être pas ce qui passionne le plus en France, tant là-bas on paraît saturé, surtout ces derniers temps, alors même qu'il y a d'autres chats, -pardon veaux, vaches, cochons, moutons-, à fouetter...

Mais il s'agit des élections présidentielles du Bénin, qui viennent d'avoir lieu.

Oui, pour être au courant de ce qui se passe ailleurs que chez nous, il faut être sacrément militant Oui, le Bénin, c'est en Afrique, alors peut-être que ce qui s'y passe est lointain et secondaire...

Et pourtant, l'ancien "quartier latin de l'Afrique" avait un autre titre à défendre, celui de "laboratoire de démocratie" sur ce continent.

Déjà au scrutin précédent (1996, tous les 5 ans, avant d'autre démocratie 'moderne'), le résultat (l'alternance) n'aura pas été le fruit d'une comptabilité rigoureuse et significative, mais l'effet de la pression de personnes et de groupes influents de la société civile: il fallait privilégier la paix sociale à la loi des chiffres.

Trait d'une société qui doit probablement sa tradition 'pacifique' à sa préférence de l'impunité et du secret plutôt qu'à la justice et à la vérité...

Et pourtant des chiffres nous apportent aujourd'hui certains enseignements. Voici quelques éléments pour cette année :

- plus de 120 partis politiques pour un pays d'environ 5,5 millions d'habitants, avec une Assemblée Nationale de 83 sièges, cela ne fait pas très sérieux, j'en conviens.

- cette année: 17 candidats au premier tour de la présidentielle, c'est beaucoup, mais au moins la preuve que l'accès est possible à tout citoyen capable de débourser 5 M Fcfa (50 000 FF, remboursables si on obtient au moins 10% de voix).

- 87 % de participation au premier tour, c'est un signe, habituel depuis la démocratisation, qu'on joue le jeu et qu'on croit à la démocratie ici.

- le 3ème duel annoncé Kérékou-Soglo, au second tour : un air de déjà vu qui pourtant mobilisait les foules.

- le désistement de Soglo deux jours avant le second tour- il est vrai que les résultats officiels sont arrivés tardivement, après plusieurs résultats partiels fantaisistes, et encore des contestations multiples -justifiées pour beaucoup d'après notre pratique du terrain-.

- une Cour Constitutionnelle erratique mais écoutée.

- un second tour plusieurs fois reporté et finalement tenu, et dans le calme, le 22 mars, qui oppose le premier du premier tour (Kérékou) _au quatrième (Amoussou), après deux désistements, le troisième avait déjà donné ses voix au second et s'est rallié à sa position, et le quatrième au premier (Vous me suivez toujours ?). Pour ce candidat de la dernière heure, la campagne électorale du second tour n'aura pas duré deux jours...

- conclusion de ce processus électoral chaotique'. l'avènement de Kérékou III avec un score de 84 % des voix (comme au temps du parti unique ... ) certes. Le vote "blanc" ayant ici encore moins de chance qu'ailleurs d'être reconnu à sa juste valeur.... le taux de participation exceptionnellement bas pour le pays nous apporte la grande interrogation, 53%, soit finalement 48% de suffrages exprimés! Des taux peut-être habituels sous d'autres cieux, mais pas ici.

Résurgence d'un fatalisme (qui peut s'appeler déception, résignation, devant des magouilles ou calculs politiciens divers) ? ou expression d'une nouvelle exigence, après les acquis récents ?

Essai d'interprétation, après la recherche de la Paix, un début de quête de la Vérité ?

Stéphane Raux